Le site Richelieu de la Bibliothèque nationale de France accueille une exposition originale. Son sujet ? Elle explore le versant le plus inventif, mais souvent méconnu, du mouvement nabi. Bonnard, Vuillard, Denis et Vallotton y révèlent leur goût pour l’expérimentation graphique. Plus de deux cents œuvres rassemblées pour l’occasion redonnent enfin à l’estampe la place centrale qui a été la sienne dans leur évolution artistique.
Retour sur le mouvement nabi
À la fin du XIXᵉ siècle, le groupe des nabis revendique une autre manière de peindre et de poser le regard sur le monde. Et si les artistes de ce mouvement se font surtout connaître par la peinture, c’est l’estampe qui leur sert de véritable champ d’exploration. Ce médium, trop souvent relégué au rang de pratique secondaire, couvre un pan méconnu du courant nabi.
La nouvelle exposition de la BnF, Impressions nabies, revient donc sur cette dimension essentielle pour bien comprendre le mouvement artistique. Et elle dévoile à quel point la gravure et la lithographie furent, pour ces artistes, un véritable laboratoire d’innovation visuelle.
Sous leur impulsion, la lithographie en couleurs adopte une forme résolument moderne. Ils réinventent aussi la gravure sur bois, jouent avec les transparences, les aplats et même avec les lignes souples inspirées du japonisme. Loin du réalisme conventionnel, les nabis imposent une nouvelle vision, plus personnelle de l’estampe.
Le papier comme champ d’expérimentation
L’exposition s’organise autour de cinq sections. Et elle retrace cette aventure graphique depuis les premières recherches (années 1980) jusqu’à l’héritage esthétique laissé par le mouvement nabi.
L’un des enjeux soulevés concerne notamment l’importance des collaborations avec les éditeurs, notamment Ambroise Vollard. Car c’est lui qui offrit à ces artistes un terrain d’expression inédit. Sous son impulsion, l’estampe devient un objet d’art à part entière : livre illustré : affiche, couverture de revue…
En effet, la liberté technique va de pair avec une volonté claire de diffuser l’art au-delà des cercles mondains. Les nabis s’attachent à rapprocher le monde de la création avec la réalité du quotidien. L’art pénètre dans l’espace domestique grâce à des papiers peints, des objets décoratifs et des programmes de spectacle. Et cet éclairage offert par l’exposition souligne bien comment cette expansion de l’art imprimé a pu annoncer les grandes ambitions du graphisme moderne.
Intimité et modernité
Moins spectaculaire que la peinture, l’estampe encourage une création plus intime. Et là où les tableaux nabis exploraient le monumental, le format réduit du papier devient le support d’une forme de proximité. Vuillard, dans sa série Paysages et intérieurs, s’intéresse aussi bien aux marcheurs d’une avenue qu’à la vue, par une porte entrouverte, de l’intérieur d’un appartement.
Cet équilibre, entre rigueur artistique et spontanéité du regard, souligne la diversité du mouvement nabi. Et Impressions nabies encourage justement le visiteur à mieux appréhender cette richesse dans la modestie d’un support que les nabis auront su magnifier.
L’exposition Impressions nabies est à voir du 9 septembre 2025 au 11 janvier 2026.
À lire aussi :