Hippolyte Kamenka : parcours cosmopolite d’un architecte russe au XXe siècle

Hippolyte Kamenka : parcours cosmopolite d’un architecte russe au XXe siècle
Photographie d’Hippolyte Kamenka, années 1960. Centre Canadien d’Architecture, Fonds AP 042
Personnalités  -   Artistes

Né en 1897 à Rostoff-sur-le-Don à 959 kilomètres au sud de Moscou, Hippolyte Kamenka est issu d’une famille juive. Début 1917 en raison de la Révolution bolchévique, son père Boris Kamenka est invité par le gouvernement français pour gérer des opérations financières entre les immigrés russes et l’État français. C’est ainsi que toute la famille quitte la ville de Saint-Pétersbourg et s’installe en France. Âgé de vingt ans lors de son départ, Hippolyte n’a pas l’opportunité de finir ses études en Russie mais, une fois à Paris, il s’inscrit à l’École Spéciale d’Architecture (ESA) où il acquiert les compétences nécessaires et commence sa carrière. Pendant son parcours universitaire, il effectue un voyage d’études à Copenhague au Danemark qui dure trois mois, de septembre à novembre 1918. Les possibilités de voyages en Europe lui permettent de développer sa vision de l’architecture comme science ainsi que de saisir les nouveautés stylistiques, les innovations en matière de matériaux utilisés, les décorations des revêtements extérieurs et intérieurs alors en vogue.

Diplômé de l’ESA en 1922, Kamenka commence à travailler dans la capitale française et élargit progressivement son champ territorial vers le sud-ouest de la France. On retrouve certaines de ses villas construites pour des particuliers à Saint-Jean-de-Luz, Hendaye et Ciboure. À Paris, il travaille principalement sur des bâtiments résidentiels comme ceux situés aux numéros 83 et 87 Quai d’Orsay ou encore au 7 avenue Vion-Whitcomb. On retrouve parmi ses constructions parisiennes un hôpital datant de 1930, la Clinique Mirabeau, géré par Monsieur Zismann à l’époque de sa fondation par les Russes qui ont fui la Révolution. La notoriété architecturale de Kamenka est entérinée par sa participation au Salon d’Automne 1923 consacré aux Arts déco. Il y présente deux façades : celle d’une parfumerie et celle d’une bijouterie. Après plusieurs années de vie en France, il devient citoyen français en 1934. En raison de la situation politique tendue et de son origine juive, Kamenka part à Londres en 1939, puis s’installe à New York en 1942 pour le reste de sa vie qui s’achève en 1990.

Tout au long de sa carrière, entre 1920 et 1970, il réfléchit à la construction des habitations dans des grandes villes comme Paris et New York. Son travail est centré autour d’une réflexion sur le régionalisme et la nécessité d’adapter l’architecture à l’environnement de chaque pays à travers le style et les matériaux. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il ne s’est jamais enfermé dans un style particulier. Selon sa vision, les nouveaux styles architecturaux ne sont pas inventés mais naissent des terres et s’y expriment. Ainsi, alors que les années vingt voient naître des courants architecturaux (De Stijl, le constructivisme) dans lesquels les habitations sont conçues comme des machines à transformer les modes de vie de façon à forger « l’homme nouveau », Kamenka, pour sa part, essaie toujours de se mettre à la place de l’habitant.

Son livre Flats ; Modern Development in Apartment House Construction paru en 1947 illustre sa connaissance approfondie de l’immobilier et de l’économie du secteur de la construction de Paris, Londres et New York. Au-delà de son livre et de ses réalisations architecturales, Kamenka a eu un impact significatif sur le développement futur de ce domaine. Ses complexes résidentiels, ses immeubles de bureaux et ses projets de maisons mettent en évidence les caractéristiques géographiques, topographiques et climatiques d’un pays, ainsi que le patrimoine historique, le mode et le niveau de vie de ses habitants.