Quel avenir pour les écoles d’art ?

Quel avenir pour les écoles d’art ?
Séance de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du 6 décembre 2023 consacrée à la situation et à l'avenir des écoles d'art en France.
Marché  -   Droit et fiscalité

Mercredi dernier se tenait au Sénat une séance consacrée à la situation actuelle et à l’avenir possible des écoles d’art. La commission du sénat, consciente des difficultés financières des écoles d’art territoriales, s’apprête en effet à faire voter un amendement concernant l’enveloppe financière qui leur est allouée. Mais, avant de porter cette action, elle souhaitait approfondir sa compréhension du fonctionnement des écoles d’art afin d’aller éventuellement plus loin dans son soutien.

À cet effet, elle avait invité Pierre Oudart, directeur général de l’Institut national supérieur d’enseignement artistique Marseille Méditerranée (INSEAMM), chargé au printemps dernier d’établir un rapport sur la situation des 33 écoles supérieures d’art territoriales. Celui-ci, remis en octobre à la ministre de la Culture Rima Abdul Malak, faisait état des difficultés rencontrées mais contenait également des préconisations visant à améliorer la situation. Ce sont les conclusions de ce travail nourries de l’audition de plus de 150 personnes que Pierre Oudart s’est attaché à rappeler aux membres du Sénat.

Commençant son exposé par un historique des écoles d’art, il a montré que, bien que leur implantation remonte au XVIIIe siècle, elles restent situées dans les mêmes lieux alors que l’organisation des territoires n’a cessé depuis de se modifier et continue à le faire. Mal positionnées dans la dynamique territoriale, elles le sont aussi au sein du système éducatif puisque, comme l’a rappelé le rapporteur, elles sont tenues de satisfaire aux critères des établissements d’enseignement supérieur de recherche alors même qu’elles proposent un enseignement de l’art par l’art dont la spécificité n’est pas prise en compte dans les évaluations.

Selon Pierre Oudart, la source globale du malaise ressenti par les écoles d’art provient surtout d’un appareil juridique trop imprécis et lacunaire de ces anciennes régies municipales devenues pour la plupart des établissements publics de coopération culturelle (EPCC) à partir de 2011. De simples corrections législatives n’impliquant pas nécessairement de dépenses coûteuses simplifieraient le fonctionnement des écoles et réduiraient ainsi la mauvaise qualité de vie tant des enseignants que des étudiants.

La commission a ensuite pu entendre Ulrika Byttner et Cédric Loire, les deux présidents du réseau ANdÉA, lequel fédère les 45 écoles supérieures d’art et design sous tutelle du ministère de la Culture. Ces experts ont listé les problèmes communs aux écoles nationales et territoriales. Ils ont ainsi rappelé les problèmes de statut pour les enseignants comme pour les étudiants. Concernant les enseignants, il n’est pas identique à celui des enseignants du supérieur et n’intègre pas les activités de recherche pourtant effectivement réalisées à travers les pratiques artistiques. Concernant les étudiants, il n’est pas non plus le même que celui des autres étudiants avec par exemple une impossibilité d’obtenir des parcours doctoraux financés.

Mais les deux responsables d’ANdÉA ont surtout abordé les problèmes spécifiques aux EPCC, et notamment ceux liés à leur budget. Si la dotation de l’État est stable, celle des collectivités territoriales est globalement en baisse et parfois proche du désengagement. Les régions ne pouvant pas combler ce déficit, les menaces de fermeture sont bien réelles pour certaines écoles.

Pourtant, comme l’a rappelé Ulrika Byttner, le taux d’insertion professionnel des étudiants sortis de ces écoles est de 80 %. En effet, les écoles d’art ne forment pas que des artistes mais des personnes aux compétences multiples souvent en lien avec les problématiques sociétales qui intéressent les régions. D’ailleurs, les diplômés des écoles d’art s’intègrent souvent dans le maillage culturel de leurs territoires, faisant vivre la culture dans des zones qui manquent de personnes qualifiées.

Ce dernier argument n’a pas laissé les sénateurs insensibles. Ils se sont donc dits prêts, même si ce n’est pas une demande explicite du Ministère, à reconsidérer la situation législative des écoles d’art. Espérons qu’ils seront soutenus. Les écoles d’art en ont besoin.