Le parcours off d’Art Brussels

Le parcours off d’Art Brussels
À voir

Installée depuis 2016 au cœur de Bruxelles dans l’emblématique bâtiment « Tour & Taxi », Art Brussels accueille un grand nombre de galeries, émergentes comme installées, et donne ainsi un aperçu de l’art du XXe et XXIe siècle. Montrant des œuvres d’artistes prometteurs encore peu connus comme d’artistes sous-estimés ou oubliés ou encore d’artistes établis à un niveau international, la foire accueille environ 25 000 visiteurs à chacune de ses éditions. Depuis quelques années, elle s’accompagne d’un festival off : une série d’expositions organisées hors les murs dans des institutions souvent fermées au public. Résidences d’artiste et artist run spaces ouvrent ainsi leurs portes durant la foire.

Damien Dion, « Onze Tableaux » (vue d’exposition) : Tableaux n° 7 et 9, 2019.

 

Dans le sud de la commune d’Ixelles, la résidence d’artiste Huet-Repolt (42 Rue du Relais, 1170) se visite de 14h à 18h vendredi et de 14h à 20h samedi. Elle présente l’exposition de fin de résidence de l’artiste Damien Dion qui pour l’occasion a invité un groupe de cinq artistes français transformant son exposition solo en exposition collective. Les œuvres de Damien Dion sont principalement des pièces produites in situ à l’image de sa série Onze Tableaux (vue d’exposition) qui se présente sous la forme de onze photographies de tableaux réalisés et exposés à l’intérieur de la maison durant son séjour. Minimalistes et conceptuelles, ses pièces reconfigurent l’espace et dialoguent avec les œuvres de ses invités. Ainsi ses clés de châssis disposées dans l’ensemble du lieu (Frame Keys (RHR)) répondent à l’énumération d’adjectif commençant par la lettre « A » de l’installation sonore A Land d’Elsa Werth, un geste répétitif qui vise à « créer un léger décalage dans le réel et à regarder autrement ce qui est déjà-là » selon l’expression de Damien Dion. De même le moulage en plâtre d’une boîte de chocolats, offerte par l’artiste Alexandre Barré comme Œuvre de remplacement, en lieu et place de l’œuvre prévue initialement fait écho à l’ouvrage Ontologie de Damien Dion au sein duquel l’artiste a juxtaposé ironiquement des photographies d’œuvres célèbres et des images trouvées sur internet. Ainsi la reproduction de l’installation de carré en acier disposée au sol par Carl Andre côtoie une photographie d’un carrelage en ciment gris. La première image est sous-titrée « Art », la seconde, « pas Art ». C’est l’intention qui prime pour cette jeune génération d’artistes héritière des gestes de Fluxus et de l’art conceptuel.

Vue de l’exposition « Calculated Chance » à l’artist run space Société, 2019.

 

Plus au centre, à quelques pas du bâtiment « Tour & Taxi », l’artist run space Société (106 rue Vanderstichelen, 1080) se visite de 11h à 19h du jeudi au samedi et de 12h30 à 16h le dimanche. Dirigé par le couple d’artistes Manuel Abendroth et Els Vermang, l’espace propose une exposition collective intitulée Calculated Chance qui explore la manière dont les artistes intègrent l’imprévisibilité et l’incertitude à leurs travaux. Très cohérente dans son ensemble, elle se divise en trois thèmes : chance, hasard et probabilité. Ainsi l’œuvre Pile ou Face de Yann Sérandour aborde le thème de la chance. Elle se présente sous la forme d’une pièce de un euro disposée sur le sol. L’artiste français l’a lancée en présence de témoins en 2007 à la VF Galerie de Marseille de façon à déterminer s’il présenterait ses travaux lors de l’exposition qui commençait le lendemain. La pièce étant tombée sur face, rien ne fut exposé, à l’exception de la pièce de monnaie elle-même, laissée là où elle était tombée. L’installation Eins.Un.One de Robert Filliou s’attaque, elle, au hasard. Posées sur le sol, ses mille six cent dès de différentes tailles et couleurs ont tous été modifiés pour contrer le processus aléatoire, chaque face présentant un seul point. L’œuvre Toutes les combinaisons d’un cadenas à trois chiffres de Claude Closky s’attache quant à elle à la notion de probabilité. Fruit d’une exploration systématique, elle se présente sous la forme d’une liste des mille combinaisons possibles pour ouvrir un cadenas à trois chiffres. Très minimales dans leurs esthétiques, ces œuvres, d’artistes reconnus comme d’artistes moins confirmés, déclinent avec humour ou rigueur les processus de l’art abstrait, de Fluxus et de l’art conceptuel.

Édith Boris, une œuvre de la série en cours : « Memorials », Pastel sec sur papier, 50x70cm, 2019.

 

Enfin, située près du jardin botanique, l’association Greylight Projects (11 Rue Brialmont, 1210) s’ouvre, elle aussi, au public durant Art Brussel. Les ateliers des différents artistes sont visitables samedi et dimanche de 11h à 18h. Open Studios permet de découvrir des œuvres en cours comme des œuvres finies. Édith Bories présente ainsi une série en cours de dessins au pastel. Fidèles à ses travaux précédents sur le thème de la mémoire, ces dernières œuvres issues de l’observation d’un mémorial situé en Yougoslavie tendent vers une abstraction de plus en plus grande. Dans un registre très différent de l’abstraction (non plus d’après nature mais expérimentant au contraire des effets de matière et de couleurs) Mélanie Berger expose deux papiers de grands formats dans lesquels le dessin couvre la surface, la sature jusqu’à créer une nouvelle texture. Enfin, Claude Cattelain propose une vidéo intitulée Fabrica/Brighton dans lequel on le voit balayer le bout d’une jetée et tenter de repousser les vagues qui la submergent. Comme souvent dans ses vidéos performances qui mêlent engagement personnel et situation absurde, l’entreprise est vouée à l’échec. Regroupant des œuvres d’artistes aux pratiques diverses, les ateliers de Greylight Projects offrent la possibilité de découvrir en plus d’univers singuliers, l’environnement de travail et les manières de faire propres à chacun.

Ces trois espaces du parcours off démontrent la vitalité de la scène artistique bruxelloise mais bien d’autres lieux sont à découvrir durant cette période, notamment la Maison d’Art Actuel des Chartreux/ MAAC (6-28 Rue des Chartreux, 1000) la résidence In-box (24 Rue des Petits Carmes, 1000) ou encore la foire Poppositions qui se positionne comme alternative aux foires traditionnelles en encourageant de nouvelles approches marchandes. Toutes les adresses sont à retrouver sur la page dédiée au Festival off d’Art Brussels : https://www.artbrussels.com/fr/During-the-fair/OFF-Programme