Tout l’art des comédies musicales à la Philharmonie de Paris !

Tout l’art des comédies musicales à la Philharmonie de Paris !
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Jusqu’au 27 janvier, la Philharmonie de Paris propose une exposition inédite en France, exclusivement tournée vers les comédies musicales portées à l’écran. L’occasion de constater à quel point ce genre cinématographique est devenu l’incarnation de la somme de tous les arts du spectacle vivant, mais aussi, de l’art tout court…

Comédies musicales. Un titre on ne peut plus explicite pour l’exposition événement qui se tient actuellement à la Philharmonie de Paris. Mais pour autant, si Broadway et le West End (le quartier londonien où se jouent tous les soirs ces spectacles mêlant théâtre, danse et chant) sont cités, c’est le septième art qui est visé. Et à voir la foule nombreuse et les derniers succès du genre au cinéma (la nouvelle version d’A star is born ou La La Land ont réuni plusieurs millions de spectateurs à travers le monde), on ne peut que constater que cet art complet n’a pas fini de faire parler de lui. En plus de ce faire l’étendard d’un genre artistique, l’exposition souligne à quel point les comédies musicales sont influencées par l’art en général. Et ce qui fut longtemps considéré comme un genre mineur devient de plus en plus majeur, au fil du temps. Car une comédie musicale, ce n’est pas seulement un film où les acteurs se mettent tout d’un coup à chanter, cela englobe également ballets et opéras filmés, dessins animés, ou films où il n’y a qu’un seul numéro musical. Un genre qui brouille les pistes et ouvre tous les « chants » du possible, dans une recherche du spectacle total.

Copyright Julien Wagner.

 

Des artisans et artistes. Si les « musicals » existent au cinéma depuis 1927, en même temps que le cinéma parlant, l’exposition choisit de commencer par ce qui est considéré comme la meilleure comédie musicale de tous les temps, Singin’ in the rain, film réalisé en 1952 avec Gene Kelly et Cyd Charisse. Car il s’agit sans doute de l’œuvre qui a le plus influencé à son tour d’autres comédies musicales (dont La La Land dernièrement qui s’y inscrit totalement). On découvre ainsi que la fameuse chanson qui donne son titre au film, date de 1929 et a été interprétée au cinéma des dizaines de fois.

Costume pour Cyd Charisse. Copyright Julien Wagner.

Pour qu’une comédie musicale soit réussie, il faut qu’elle mette en adéquation artistes et artisans. Ces derniers, qu’ils s’attèlent aux décors ou aux costumes, ont un rôle indispensable. « On doit sentir les matières des tissus (…). Simples mais de couleurs vives, illustrations enfantines plus proches de Disney que du bon goût, ou plus Disney que Gustave Doré », disait Jacques Demy pour Peau d’âne. Ce sont eux qui donnent au film sa dimension artistique, comme une peinture qui attendrait de recevoir les personnages qui vont hanter ses contours. Si un bon réalisateur est préconisé, un excellent compositeur est plus que nécessaire, comme Leonard Bernstein, qui a non seulement composé des opéras et des symphonies, mais aussi a signé la musique de West Side Story, l’une des bandes originales de film les plus vendues de tous les temps. Sans oublier un chorégraphe de génie, comme le fut Bob Fosse (Pippin, Chicago…). Des écrans géants montrent d’ailleurs tout ce travail, avec des extraits documentés aussi fascinants qu’impressionnants.

Les costumes de « Peau d’âne ».
Copyright Julien Wagner.

 

Des performances artistiques. Car les comédies musicales virent parfois à l’art, purement et simplement. Les pas de danse de Fred Astaire et Gene Kelly ont inspiré les plus grands (de Bob Fosse à Michael Jackson), ceux de Cyd Charisse semblent en avance sur leur temps et peuvent donner des leçons aux artistes d’aujourd’hui et certains passages pourraient être utilisés dans des musées en tant que performance artistique. C’est le cas, par exemple, de la scène de l’hippodrome de My Fair Lady, sous la direction artistique de Gene Allen, avec spectateurs au visage impassible, exécutant des pas de danse sophistiqués.

« 42nd Street », une chorégraphie de Busby Berkeley.

 

Mais c’est parfois le film lui-même qui peut se targuer de pareil titre. Notamment ceux de Busby Berkeley, amoureux à la fois des corps féminins et de la géométrie et dont les images chorégraphiques, qui flirtent avec l’abstrait, le kaléidoscope et le fantasme, ont inspiré bon nombre de plasticiens. Les comédies musicales sont ainsi des laboratoires d’expériences et d’expérimentations, avec des effets spéciaux inédits pour l’époque (la danse au plafond de Fred Astaire dans Mariage Royal de Stanley Donen), dont le trucage inspira 2001 l’Odyssée de l’espace de Kubrick, rien que ça.

Des références à l’art. La figure du Pygmalion (renvoyant à la figure mythologique du sculpteur tombant amoureux de sa création) n’a eu de cesse d’être représentée dans l’art. On peut citer Pygmalion et Galatée de Girodet, Pygmalion et l’image de Burne-Jones ou encore Galatée de Robert Le Lorrain ou La Poupée de Hans Bellmer. Mais c’est aussi une des figures les plus citées dans les comédies musicales, plus ou moins directement. Il y a bien entendu My Fair Lady avec Audrey Hepburn d’après une pièce de George Bernard Shaw où une jeune fille des rues devient dame du monde sur les conseils d’un riche érudit. Mais il y a aussi A star is born (ou Une étoile est née en français), qui n’a eu de cesse d’être adaptée au cinéma, décennie après décennie, prenant les figures de Judy Garland, Barbra Streisand ou récemment de Lady Gaga. Là encore, un chanteur reconnu qui prend sous son aile une jeune pousse de la chanson dont il tombera amoureux, même si sa création s’incarnera tellement qu’elle finira par le dépasser et lui échapper.

Les tableaux qui ont inspiré « Un Américain à Paris ». Copyright Julien Wagner.

Une référence mythologique, une parmi tant d’autres, chaque comédie musicale ayant ses propres fondations. Car rares sont les scénarios originaux, la plupart adaptant une œuvre qui existe déjà : le conte (comme pour Peau d’âne ou La Belle et la Bête), un roman (Le Magicien d’Oz, Le Fantôme de l’Opéra…), des poèmes (Cats…), un catalogue de chansons (Mamma Mia, Jersey Boys)… Et certaines sont ultra référencées artistiquement. C’est le cas d’Un Américain à Paris, dont les images sont inspirées notamment de Renoir (Le Pont Neuf), Van Gogh (La Nuit étoilée), Toulouse-Lautrec (Chocolat dansant dans un bar) ou du Douanier Rousseau (Paysage exotique). Encore quelques jours pour découvrir ou redécouvrir sous un autre œil, les multiples facettes des comédies musicales…