À Cris Ouverts, Rennes

À Cris Ouverts, Rennes
Oreet Asher, Revisiting Genesis, 2016 - Musée des beaux-arts de Rennes, © Aurélien Mole.
À voir

La nouvelle biennale d’art contemporain de Rennes, ouverte au public depuis le samedi 29 septembre, prendra fin le dimanche 2 décembre 2018. Comme lors des éditions précédentes, le thème, voulu par le mécène majoritaire et président de l’association Art Norac Bruno Caron, porte sur les multiples connexions qu’entretiennent l’art et l’économie. Il est cette année mis en scène par les commissaires d’exposition Céline Kopp et Étienne Bernard.

Pour cette sixième édition, le choix des commissaires a été d’entreprendre les multiples espaces d’exposition de façon autonome; les différents lieux proposent des sujets et des directions singulières que le spectateur est invité à parcourir. Ainsi, la majorité des œuvres exposées se concentre sur trois sites : le Frac Bretagne, la Halle de la Courrouze et le Musée des Beaux-Arts. Les cinq autres antennes (et lieux de vie de l’activité artistique rennaise), à savoir le 40mcube, la galerie Art&Essai, Lendroit éditions, la Criée et le Phakt, présentent quant à elles des expositions monographiques. Au-delà du circuit rennais, la galerie Raymond Hains (Saint-Brieuc) et la Passerelle (Brest) participent à l’événement. En comparaison de la précédente réalisation Incorporated ! orchestrée par le commissaire d’exposition François Piron, les espaces ont été revisités. La métamorphose des lieux du Frac et de la Courrouze est une réelle réussite.

Pauline Boudry et Renate Lorenz, I want, 2015 – 40mcube, © Aurélien Mole.

 

L’actualité est à l’honneur, les œuvres témoignent de préoccupations pour les questions de genre, de réappropriation culturelle et des nouveaux réseaux. On notera l’omniprésence de vidéos, accompagnant le visiteur et rythmant les expositions. À la Courrouze, la prose de Julien Creuzet accompagne le spectateur jusqu’aux cris de plaisir de l’installation Who wants to be my horse de Julie Béna. Au Frac, les projections aux allures cinématographiques de Wu Tsang et de Basim Magdy étendent de nouveaux panoramas. Au musée des Beaux-Arts, les écrans aux multiples prothèses métalliques présentant des captations vidéo de drones de Dan Walwin suggèrent un monde inspiré de la SF et de la modélisation numérique alors que la web série Revisiting Genesis d’Oreet Ashery immerge le spectateur dans un espace blanc immaculé. On retiendra, pour terminer, la très belle exposition personnelle Dans l’éther, là, ou l’eau de Paul Maheke présentée à la galerie Art&Essai. A travers différents médiums, l’artiste propose une vision poétique du mouvement du corps, des pratiques de l’occultisme et de l’attraction cosmique.

Meriem Bennani, Siham & Hafida, 2017 – La Criée centre d’art contemporain, © Aurélien Mole.

 

Pour cette édition, la question de l’économie a été traitée dans son sens large. Il n’est plus question ici d’axer le propos sur le seul croisement entre art et économie. La réponse des commissaires a été de mettre en relief des modes de résistances, des réappropriations et des manières d’être artistiques dans un système globalisé, d’exposer, sous différentes formes, un appel à l’ouverture. Le choix du titre À Cris Ouverts est lui-même un appel à une interprétation plurielle. L’expression provient de l’ouvrage La Cohée du Lamentin d’Edouard Glissant. « La pensée du Tremblement surgit de partout, musiques et formes suggérées par les peuples. Musiques douces et lentes, lourdes et battantes. Beautés à cri ouvert. Elle nous préserve des pensées de système et des systèmes de pensée ». Travaillons notre philanthropie, restons (nous aussi) ouverts.