Exposition « Picasso dans l’œil de Willy Rizzo ». Rencontre avec Dominique Rizzo.

Exposition « Picasso dans l’œil de Willy Rizzo ». Rencontre avec Dominique Rizzo.
Par Willy Rizzo.
À voir

A l’occasion de l’exposition Picasso dans l’œil de Willy Rizzo au Studio Willy Rizzo, présentée jusqu’au 12 janvier 2019, le public va pouvoir découvrir une quarantaine de clichés, souvent inédits, toujours étonnants, du grand maître par le photographe de renom Willy Rizzo. Rencontre avec Dominique Rizzo qui nous présente cette exposition pas comme les autres.

Pourquoi cette exposition ?

Dominique Rizzo : On parle beaucoup de Picasso et de son œuvre, les gens ont une certaine idée de lui à travers elle, les écrits des historiens ou les témoignages de ses différentes compagnes. Mais je voulais que l’on voit une autre image de lui, dans sa vie de famille, avec son regard sur ses enfants ou sa compagne de l’époque, Françoise Gilot. Je voulais que l’on perçoive l’homme, dans son entièreté. D’ailleurs, dans certaines photos, il reste encore très séduisant, avec sa cigarette et une tenue assez sophistiquée et charmeuse…

« Pablo Picasso à Vallauris – 1953 », par Willy Rizzo.

 

Le choix des clichés a dû être draconien….

DR : Nous avons sélectionné 36 photos pour l’exposition, mais nous en avons, bien évidemment, des centaines. Il y en a autant en couleur qu’en noir et blanc, car Willy Rizzo avait besoin de la couleur pour capter Picasso et sa personnalité.

Que retire-t-on de Picasso sur ces clichés ?

DR : Il était un homme très fort, avec un regard très puissant, beaucoup de charme, voulant séduire, mais aussi un homme de famille aimant beaucoup ses enfants et étant attaché à sa compagne. C’est ce que moi j’en déduis, mais peut-être que des collectionneurs verront d’autres choses à travers ces photos. Chacun imagine et voit ce qu’il souhaite. C’est ce que Willy Rizzo voulait montrer, l’angle à travers lequel il voyait Pablo Picasso. C’est bien que l’on ait une image plus humaine de Picasso et pas seulement le souvenir d’un de ses tableaux de sa période cubiste ou sa période bleue. Ces photos partent de l’homme et on y comprend sa démarche. On apprend beaucoup dans son regard, son demi-sourire, sa façon de se tenir, sa façon d’être avec sa compagne. On a l’impression d’une certaine jeunesse. Il n’y a pas d’âge pour les artistes. Quand on a besoin de créer ou de s’exprimer, ça ne s’arrête jamais. Picasso et Rizzo ont d’ailleurs continué de travailler jusqu’au dernier moment…

« Pablo Picasso et sa femme avec ses enfants -Vallauris » par Willy Rizzo.

 

A l’inverse, que traduisent ces images du travail de Willy Rizzo ?

DR : Il ne considérait pas la photo comme un travail. Pour lui, c’était une expression de soi, un besoin de saisir un regard, une attitude, qui paraît comme une synthèse de la personne. Il avait cette sensibilité de comprendre les gens et de les ressentir. Il voulait capter l’éphémère et la personnalité de son sujet. Ce sont presque des photographies-synthèses.

Comment Willy Rizzo et Picasso se sont-ils rencontrés ?

DR : Ils se sont rencontrés à travers le travail de Willy dans la presse. Willy Rizzo était déjà très connu et il travaillait pour beaucoup de magazines, dont Paris Match. Il avait envie de faire des photographies couleur de Picasso et il y avait un certain intérêt mutuel entre Pablo et lui Il y a eu des échanges entre eux et ils ont décidé de travailler ensemble.

« Pablo PIcasso à Vallauris », 1953. Par Willy Rizzo.

 

Est-ce Picasso qui suggérait les poses ou Willy Rizzo qui les imposait à Picasso ?

DR : C’est Willy qui décidait. Pablo, lui, décidait de ce qu’il voulait dans ses œuvres. Mais là, c’est Willy qui savait l’angle qu’il voulait donner à ses photos. C’est la personne qui est derrière la caméra qui sait ce qu’il se passe, pas celle qui est devant. Il y a eu quelques petits heurts pendant les séances, car Willy était très exigeant et il ne faisait que ce qu’il voulait. Mais au bout du compte, Pablo s’est plié avec confiance aux poses que lui demandait Willy.

« Pablo Picasso – La chèvre », par Willy Rizzo.

 

Parlez-nous de cette fameuse anecdote des ardoises…

DR : Willy était assez fâché… Dans son travail, il était assez malin et il avait eu l’idée d’apporter des ardoises pour parler de l’éphémère. Il avait demandé à son assistante d’acheter des ardoises, mais aussi un fixateur. Il y avait en tout 12 ardoises. Il a demandé à Picasso de dessiner dessus, ce qu’il fit. Son assistante a alors posé le fixateur sur une des ardoises. Mais Picasso a refusé tout net, en prétextant que son galériste allait poser des problèmes, vis-à-vis de sa cote et qu’il ne pouvait rien donner à personne. Il a tout de même offert une assiette à Willy, qu’il a malheureusement cassée. Ils ont retravaillé ensemble par la suite, le malentendu s’était vite dissipé.

« Pablo Picasso – Tableaux », par Willy Rizzo.

 

On voit également Picasso dessiner sur du sable…

DR : Oui, c’est dans la même lignée : devant l’éphémère, garder une image de l’artiste, de son geste, de ce qu’il pouvait imaginer sur le sable, tandis que tout cela allait disparaître dès la première vague…

Où se sont déroulées les différentes séances ?

DR : A Valoris, Cannes, en Californie… Picasso était très content de continuer ce travail et l’exposition montre d’ailleurs toutes les séances qui ont eu lieu.

« Pablo Picasso – Escaliers sculptures » par Willy Rizzo.

 

Ces images ont-elles été déjà vues en dehors de cette exposition ?

DR : Quelques-unes ont été publiées dans Paris Match, d’autres dans des livres et le reste était dans nos archives. Paloma Picasso était venue me voir il y a deux-trois ans pour en acheter quelques-unes. C’est bien que le grand public et les collectionneurs puissent les voir. Elles sont faites pour être vues.

Studio Willy Rizzo, 12 rue de Verneuil, 75007 Paris.